Catégories
L'eau

L’Esprit de la Dordogne

Truite bleue

L’eau descendit des montagnes, doucement d’abord, puis au fur et à mesure, prit de la vitesse en rencontrant d’autres eaux qui venaient aussi de la montagne. Elle coula au même endroit pendant des millénaires et usa le minéral qui se laissa faire.
Elle devint Dordogne.
D’abord blanche et opaque, elle se fit bleue et cristal. Dès lors, les rayons du soleil effleurèrent les galets et la magie opéra.

Ainsi, au détour du rocher, là où le courant massif attaque le calcaire, l’eau créa la truite. Au début, ce n’était qu’une vision fugitive, une lame acérée d’eau au-dessus du gravier qui apparaissait et disparaissait au rythme des turbulences. Elle emprunta la couleur du sable conjuguée à celle du soleil qui filtrait et se suspendit dans l’eau avec l’aisance de l’eau. Des cascades imprimèrent sa robe de rubis, de poudre d’or, d’améthyste et de topaze. Son corps aima le courant et la rivière aima ce corps et le renouvela. C’est ainsi que la truite devient l’esprit de la Dordogne.

Catégories
L'eau

L’expérience spirituelle de la nature par l’Aquarelle

Avoir conscience de la richesse de la nature qui m’entoure et regarder autour de mon sujet, ne pas être au centre mais se fondre dans l’étendue. La dimension de la nature nous est devenue étrangère car nous la percevons de manière égocentrée et dominatrice. Que l’on soit spécialiste ou amateur, botaniste ou géologue, notre intention est de la maîtriser à travers un savoir. Pire encore, elle est devenue pour chacun un bien de consommation que l’on loue à l’heure dans de multiples activités prétendument sportives, le temps d’une décharge d’adrénaline que nous refuse le quotidien.

Illusion. La nature ne se domine pas, ne se consomme pas. Elle a une autre vocation que nous devons cultiver. Au fond du fond, je demeure un animal. Et si je l’accepte avec conviction, je vais pouvoir me réconcilier avec le “tissu naturel”.

Lorsque je peins, j’ai l’impression de disparaître à moi-même et je me répands dans la feuille, dans l’arbre, dans la forêt. Alors, je vois avec les yeux du chevreuil, du lièvre, de la corneille. Je me suis fondu dans la nature. C’est un état particulier qui unit l’intensité sensorielle à une profonde quiétude. Je vois tout et mon pinceau devient mon doigt. Je perçois chaque détail, je reçois la vibration de chaque couleur. Le temps n’existe plus qu’à travers la durée du vol d’une mouche, du chant d’une fauvette, du tambourin d’un pic… La précision infinie de l’aquarelle absorbe cette ambiance avec toute la vie qu’elle contient. Elle devient une vibration permanente. Son empreinte résonne en moi et m’accompagne vers l’harmonie.

Catégories
L'eau

Regarder consciemment

Nous perdons notre capacité d’émerveillement dès que nous sortons de l’enfance. Cela est dû au fait que nous ne regardons plus notre environnement de la même manière : nous voyons les choses sans les regarder.
Voir est un acte passif, alors que regarder est actif.


Je suis bien tenu en tant que peintre de regarder mon modèle. Pour le dessiner et le peindre, j’ai recours à une analyse picturale qui fait intervenir, à travers l’œil, le cerveau et la main. Le respect des proportions, des formes et de la perspective me demande une concentration soutenue. J’ai éguisé cette faculté à regarder le monde consciemment à la recherche du modèle idéal. Le cadre de ce ruisseau fait apparaître un détail qui n’est pas le fruit de mon imagination. Il y a bien à gauche, dans la chute d’eau, une porte. Quelle monde retient-elle? Rêvons…

Notre temps foisonne d’images transportés par une technologie délirante qui nous submerge de visions. Là, nous ne rêvons plus ! Quel paradoxe actuel d’opposer une aquarelle au fourmillement d’images d’internet. Malgré tout, la peinture existe encore et toujours, peut-être parce que un être humain regarde ce que ne voient plus les autres. La peinture enchante l’œil et permet de retrouver l’émerveillement..
Ouvrez la porte !