Avoir conscience de la richesse de la nature qui m’entoure et regarder autour de mon sujet, ne pas être au centre mais se fondre dans l’étendue. La dimension de la nature nous est devenue étrangère car nous la percevons de manière égocentrée et dominatrice. Que l’on soit spécialiste ou amateur, botaniste ou géologue, notre intention est de la maîtriser à travers un savoir. Pire encore, elle est devenue pour chacun un bien de consommation que l’on loue à l’heure dans de multiples activités prétendument sportives, le temps d’une décharge d’adrénaline que nous refuse le quotidien.
Illusion. La nature ne se domine pas, ne se consomme pas. Elle a une autre vocation que nous devons cultiver. Au fond du fond, je demeure un animal. Et si je l’accepte avec conviction, je vais pouvoir me réconcilier avec le « tissu naturel ».
Lorsque je peins, j’ai l’impression de disparaître à moi-même et je me répands dans la feuille, dans l’arbre, dans la forêt. Alors, je vois avec les yeux du chevreuil, du lièvre, de la corneille. Je me suis fondu dans la nature. C’est un état particulier qui unit l’intensité sensorielle à une profonde quiétude. Je vois tout et mon pinceau devient mon doigt. Je perçois chaque détail, je reçois la vibration de chaque couleur. Le temps n’existe plus qu’à travers la durée du vol d’une mouche, du chant d’une fauvette, du tambourin d’un pic… La précision infinie de l’aquarelle absorbe cette ambiance avec toute la vie qu’elle contient. Elle devient une vibration permanente. Son empreinte résonne en moi et m’accompagne vers l’harmonie.